SaintéLyon 2013 – Récit

SaintéLyon 2013 – Récit

5 janvier 2014 23 Par julien

C’était il y a un mois. Certains détails se sont sans doute un peu évaporés, mais l’essentiel devrait ressortir ici. Avant cette 60ième édition de la SaintéLyon, la 3ième pour moi après un « échauffement » (que je recommande fortement avant de se lancer sur le solo) sur la SaintExpress, j’avais comme tous lu beaucoup de choses sur cette course, son ambiance, ses difficultés, la nuit, la distance, la facilité de ce « faux trail », ou plutôt de cet « ultra-cross » (merci Florent pour l’expression !)

Mais la SaintéLyon, reste une bien belle aventure, à aborder avec un minimum de préparation, de respect et d’humilité même. Car quel que soit le rythme et le classement final, il faut (par)courir ses 75 kilomètres…

De mon coté, j’ai fait le choix de viser une performance, avec un objectif chrono, des temps de passage estimés. La distance ne me faisait (presque) plus peur, la prépa s’était très bien déroulée, dans l’enchainement du marathon pour me construire une bonne base de vitesse et de résistance. La météo a été quasi parfaite, car comme le dit si bien le Joe Bar Team, la glisse et le verglas c’est dans la tête !

Après, ça reste « une » performance parmi tant d’autres. Je ne suis pas un pro, bien loin d’un « top 100 ». Je suis très content de mon résultat bien sur, mais je l’attendais aussi, car cette course était un, sinon « le » principal objectif de mon année et  je l’avais préparée depuis longtemps (marathon bien placé dans le temps, plan d’entrainement perso aux petits oignons)

Comme toujours, je cherche à d’exploiter mon potentiel et me faire plaisir. Il y aura toujours du monde devant !

Ce récit ne vous donnera que ma vision personnelle de la course. Il n’y a pas de recette miracle. Juste un ensemble de choses qui se sont bien assemblées grâce à la prépa ou mon expérience de cette course…

 

Dès 23h15 sur la ligne de départ, je suis très bien entouré. Les « copains qui courent » de la Runnosphère sont presque tous là, avec des pièces rapportées très sympathiques ;)

On est assez bien placés pour ne pas se faire prendre par la foule à la sortie de Saint Etienne et l’effet pingouins fonctionne très bien car personne ne ressent les -5° affichés. Je prends le temps de me concentrer un peu, ou d’essayer de faire le vide. Je ne sais pas. Ce qui m’attend n’est pas très compliqué. Juste courir à 12 au départ, penser à manger et boire régulièrement et être prudent dans les descentes. Je repense aussi aux messages d’encouragement reçus, notamment ceux des 2 Bertrand, blessés cette année, mais avec qui j’ai fait toutes mes SaintéLyon…

Ce soir, les ambitions chronométriques sont variées et parfois se recoupent, mais on part ensemble. De droite à gauche : Romain, Philippe, Cyril, Nico et moi, Franck et Greg en premier rang.

saintelyon-depart

Minuit pile ! Le plan est lancé. Nico suis le sien, et son expérience lui fait opter pour un départ moins rapide mais adapté à ses allures (un peu sous l’as42 comme moi je crois). Les autres suivent le mien ;)

Le but est d’avaler la partie plate en ville vers 12km/h (un peu plus lent que mon AM. c’est pas si ambitieux…) pour éviter d’éventuel bouchons si des congères réduisent les tracés plus loin, et ainsi passer à St Christo à 1h30 pour arriver à Sainte Catherine vers 3h – 3h10.

Sur le plat, on restera assez groupé. J’ai le bonheur de retrouver mon pote Yoyo en cours de route (il lance une équipe de relayeurs), mais perd vite tout le monde dès que la pente s’élève. L’ambit affiche une allure vers 4’55 et je préfère lever le pied afin d’être prudent pour la suite.

J’arrive donc seul devant le ravito de Saint Christo. Je n’ai pas prévu de m’y arrêter mais m’approche instinctivement de la tente, avant de me raviser. Le premier arrêt (4′) sera à Sainte Catherine.

Pour y arriver, les sentiers et la nuit étaient superbes, avec un ciel très clair rempli d’étoiles. J’ai bien sur pris le temps de me retourner pour admirer le serpentin de lucioles, profiter de la course et mes sensations étaient excellentes. Comme prévu le froid est assez vif sur les crêtes et je « règle » ma température en ouvrant / fermant mon coupe-vent léger.

J’arrive très frais physiquement sous la tente (l’année dernière j’avais eu un peu froid et du coup mal au ventre) et je retrouve avec joie mes compères.

Mais je suis assez speed ! Le temps de faire le plein et de manger un bout, je reperds tout le monde, sauf Philippe. Greg a filé devant (à ma poursuite…) et les autres se sont volatilisés.

Nous voilà donc à deux pour une des plus belle partie de ce nouveau parcours. Il y a pas mal de plaques glissantes et piégeuses mais je passe au travers sans tomber. Chance, accroche, petits pas légers ? Surement un mélange des 3… Les passages en crête nous permettent de profiter du paysage. Mais Lyon est encore loin…

Sur une portion de route, je ramasse un gel au sol. Il est noir, sans marque, mais encore scellé. Je me l’enfile direct. Gout canard WC ! Il a surement été perdu par un coureur élite car jamais un coureur normal n’achèterai ça… :)

En chemin, j’essaye de faire profiter de ma connaissance du parcours (bien aidé par le plan de course roulé dans la poche extérieure du sac) à Philippe qui semble très concentré sur sa course. On s’accroche tous les deux, jouant entre les plaques de neige et de glace sur un bon rythme mais avec toujours un souci d’économie (relative…) et courant aussi après Greg…

Dans la bonne montée du bois d’Arfeuille, il y a de l’ambiance. De la lumière grâce à un sponsor, et de la musique grâce à un groupe positionné au sommet !

Il faut donner un bon petit coup de cul, mais ça reste très court. Philippe apperçoit Greg qui fait le pitre, juste devant… mais trop loin pour nous entendre et il relance plus fort pendant que mon compagnon m’inquiète avec des débuts de crampes. Tant pis pour Greg. On essaye de gérer ça avec un « point course » : la ravito de Saint Genoux n’est pas loin. La course va bientôt pouvoir commencer…

Cette tente est la plus petite de la course. On y passe quand même 6’… J’en profite pour jeter un oeil au chrono et au classement : 4h28 et dans les 400ème. Pile dans les clous. Je préviens aussi Philippe que le prochain arrêt, Soucieux, sera bien différent : un grand gymnase, presque chauffé, éclairé, avec des banc, des gens qui parlent et vous font des sourires en vous proposant une soupe chaude. Bref, c’est un mouroir !

Il ne faut même pas songer entrer là avec l’envie d’abandonner, sous peine de finir en papillote ;)

Mais on se remet en route. C’est dans cette portion que je vais perdre mon compagnon sans m’en rendre compte ; surement au profit d’une descente où ma Nao m’aura valu un « merde y’a une bagnole qui double ». Voilà un achat dont je suis toujours très satisfait après plus d’un an d’usage régulier. Efficace et fiable !

Je crois que c’est dans cette portion que le parcours passait par dans une petite rivière. Comme toujours, je trace au plus court, en faisant confiance à mes pieds préparés (nok, tano) et aux capacité d’évacuation et de séchage des mes chaussettes  / chaussures. C’est franchement plus simple que de chercher à éviter les flaques, même si le mélange de neige fondue et de boue, c’est froid !

Comme tous les 10 kilomètres, un panneau annonce la distance avant l’arrivée. Celui des « 30km » me fait du bien. Une bonne sortie longue et c’est plié !

C’est aussi dans ces sentiers que je vais prendre un pied incroyable. J’ai une grande sensation de facilité. Les kilomètres défilent dans les singles entre les arbres et il y a maintenant assez peu de monde. Au 50ème, je me laisse guider par des points réfléchissant sur les arbres, toujours sur mon nuage, mais je me dis aussi que cela fait longtemps que je n’ai pas mangé. Une petite pâte d’amandes serait la bienvenue. C’est là que mon pied se prend dans « un truc » qui m’envoi directement au tapis pour une roulade dans les feuilles…

ça réveille ! Personne à l’horizon, je remets ma frontale en place et reprend mon chemin. Pas vu, pas pris. L’honneur est sauf :) J’en garde par contre un souvenir sur la main droite, que je ne me souviens pas avoir tapé… Un mois après, rien à la radio ni au scanner, mais toujours des douleurs fortes sur certains mouvements…

Arrivé à Soucieux, il n’y a pas grand monde dans le ravito. La motivation est toujours là, bien aidée par les bonnes sensations et un timing collé aux prévisions. Des bananes, du chocolat, une rondelle de saucisson. Je picore à l’envie. Comme à chaque arrêt, je mets un stick de bicarbornate dans un bidon, une pastille de boisson iso dans l’autre et je repars au bout de 4’40.

La fin est proche. Je sais qu’il y aura maintenant quasiment que du bitume et pas mal de descentes pour un gros semi jusqu’à Lyon. Sauf que sur le bitume, dès que ça ne monte pas, il faut courir… Et même si je suis encore assez bien, les kilomètres commencent à peser un peu dans les guiboles…

Heureusement, il fait presque bon. J’ai rangé mes gants et mon bonnet depuis longtemps. Vers 7h, je profite encore une fois du magnifique ciel très clair pour admirer la vue sur la ville, parce que « courir la SaintéLyon, ça n’a vraiment rien à voir ». Je range la frontale dans mon sac et attaque les dernières descentes…

Le chrono me motive. J’ai envie d’en finir et les 7h59 semblent encore possibles et j’accroche 10km/h « tout rond » sur cette portion. Du coup je déboule quasiment en bas de Beaunant. Il est 7h27. D’après mon planning il reste 5 bornes dont la montée des aqueducs. C’est jouable ! J’attrape 3 pates de fruits au vol et attaque « le mur » bien remonté (plus de 800m/h sur la première partie). Je dépose une fille qui me félicite pour mon allure. Je la remercie en disant que je veux arriver avant 8h…

Mais une fois en haut, c’est le drame ! Une bénévole (et un panneau) annonce la fin de la côte et l’arrivée à 5,5 kilomètres ! Je prends alors conscience du temps qu’il me faudra pour finir comme un gros coup de bambou. La jeune fille me dépose à son tour en me proposant de m’emmener pour que je me remette péniblement à courir… Elle finira 2′ avant moi ;)

Dernière descente, quelques marches à avaler, Lyon est là. Je me traine, même si après coup je tiens encore 10,7 de moyenne d’après l’Ambit…

Gerland est juste là. Sur le pont Pasteur, j’aperçois une grosse voiture blanche qui ressemble étrangement à celle de mon père me doubler. Je ne suis pas sur. Mais elle ralenti et s’arrête en warning 200m plus loin. Je fais alors un énorme effort, non pas pour sauter la barrière qui sépare la course de la route, mais pour ne pas éclater en sanglot. Lou est survoltée à l’arrière. Après de gros mais furtif encouragements et des câlins à travers la vitre baissée, la voiture l’emmène vers l’arrivée pour que je puisse continuer mon petit rinçage des yeux ;)

Dans le parc de Gerland, il fait jour depuis longtemps. Bastien, qui a bouclé la SaintExpress en guise de course de reprise m’accueille un peu avant la ligne. Il me dit aussi que Greg après qui je cours depuis 45 bornes est 5′ derrière…

Je franchis la ligne au bout de 8 heures et 15 minutes, en marchant tranquillement pour prolonger un peu l’instant. La pression retombe d’un coup, je suis finalement bien cuit et très content de ma course, son déroulement et du résultat (264ème).

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