Récit d’ultra trail : ut4m 90k 2015

Récit d’ultra trail : ut4m 90k 2015

29 août 2015 45 Par julien

Pas de facile de trouver le vrai début de cette aventure. Et la fin n’est pas forcément juste après la ligne d’arrivée. Il y a tellement de choses à dire sur cet ut4m que je ne suis pas sûr d’arriver à faire un récit chronologique, à ne pas louper des morceaux. Mais j’aime beaucoup ce genre d’exercice, pour partager l’expérience, ouvrir la discussion, garder une trace aussi pour moi. Ce qui fonctionne, ce qu’il faut revoir. Les bons et les mauvais moments qui ont la fâcheuse tendance à s’évaporer en même temps que les courbatures…

Prologue UT4M

Le préambule a été posé fin mai à l’occasion de la Maxirace. J’ai vécu une belle course. Facile. Sans doute trop. Malgré les amis, les paysages, les courbatures. il manquait une pièce au puzzle… Et puis c’est Greg et Vincent qui m’ont donné le coup de grâce à la la Pasta Party de la Runnosphère. On se revoyait depuis Annecy et le premier avait enchaîné avec le 80km du Mont Blanc, le deuxième avec un ultra en Islande. Leurs impressions, les récits, les photos m’ont fait replonger rapidement.

L’ut4m (Ultra Tour des 4 Massifs) s’est vite imposé. Si la course phare (les 4 massifs entourant Grenoble à parcourir – Vercors, Taillefer, Belledonne et Chartreuse – 160km et 10 000m de dénivellé) reste un autre sport, l’événement propose des parcours plus accessibles, sur presque tous les massifs, en « découpant » le 16O : un KV (Kilomètre Vertical et pas Koala Volant), les 40k dans le Vercors et la Chartreuse et donc un 90 qui m’a permit de m’échauffer dans Belledone avant de redécouvrir la Chartreuse adorée l’année dernière.

Quelques mots sur l’organisation :  c’est parfait, bien rodé pour cette 3ème édition. Très pro, tout en restant une « petite course » (environ 300 coureurs par course) sublimée par 500 bénévoles qui font littéralement du « service à la personne » à chaque instant. Bravo et Merci !

Un ravito type sur l’ut4m, c’est ça :

  • on m’accueille très chaleureusement, avec des sourires.
  • à peine assis, un bénévole récupère mes bidons pour mes les remplir. Eau plate ou pétillante ?
  • on te demande ce que je veux manger : sucré, salé, dur, mou, soupe, PASTEQUE !!!

Vous avez déjà vu un tel traitement de faveur ? Cela en est presque gênant !

Conclusion UT4M Master

(oui je sais c’est assez brutal, mais c’est uniquement pour vous épargner mon long discours)

J’ai mis 18h29 pour venir au bout de cet ut4m 90 (93,5km / 5900m. Un peu plus que prévu suite à une modification de parcours de dernière minute). Et comme je sais que pour faire du clic et de l’audience il faut parler de matos et donner des chiffres voilà déjà quelques spécimens :)

  • 1h22 : le temps passé assis à me faire chouchouter par les bénévoles
  • 3h35 : le plus gros « relais » pour monter à la croix de Chamrousse (petite boucle dans Uriage non comprise) 21k / +2100m
  • 10,8 : la vitesse pour descendre du Grand Colon. Je me suis fait plaisir – 9k / -1200m (et il restait encore 7,7k / -960 après la pause à Freydières)
  • 2h30 : la durée de ma laborieuse montée au col de la Faita (4,8k / +1165m)
  • 6h12 : mon chrono sur la partie « chartreuse » l’année dernière. 9h20 ce coup-ci !

Comme je sais que votre temps est précieux, cliquez ici. Google m’a permis de créer assez rapidement une « histoire » de ma course grâce aux photos. C’est plutôt joli même je ne ne peux pas l’intégrer directement au blog. Cliquez donc sur le lien et revenez ici après si vous voulez plus de détails, plus de photos ;)

 

 

Mon matériel pour cet ultra trail

L’organisation impose un matériel obligatoire. C’est parfois lourd, encombrant. Mais justifié.

 

Les principaux éléments :

Chaussures : Altra Lone Peak 2.0

J’ai eu mal aux pieds à la fin et je pense que ça m’a empêché de bien courir les parties roulantes en bas de Chamechaude et de la Bastille. Dommage. C’est mon seul regret sur cette course car sur le plat (et en montée forcément) ça déroulait bien avec presque 11km/h de moyenne dans les rues de Grenoble pour le finish.  Elles avaient très bien fonctionné sur la maxi. Mais là, il y a plus de cailloux. Pas forcément des gros pavés partout, mais des petits pointus et solidement ancrés dans le sol qui n’ont pas fait bon ménage avec mes 80kg. (relire mon test)

Sac à dos : Kalenji 9/14L

Ce n’est peut-être pas le meilleur (il a surtout le gros défaut d’avoir une ouverture principale trop étroite), mais il fait très bien l’affaire sur mes 2 ultras alors pourquoi dépenser plus ?

Je l’utilise avec 2 gourdes souples hydrapak 500mL (les flasques salomon sont trop longues et ne conviennent pas) pour répartir le poids et laisser de la place derrière. J’aime bien les petites poches le long des bidons pour mes barres, celles sur le coté (il faut être souple des épaules mais c’est pas mal) et les attaches pour les bâtons fiables)

Bâtons : Guidetti explore carbon

Mes meilleurs amis du week-end. Je suis toujours fan du système de gant. Par rapport à la Maxi je les ai recoupé un peu (4cm) et c’est parfait.

Et sinon, un short kalenji à 10€, des chaussettes kalenji run intensive, ma Petzl Nao toujours parfaite et bien sûr le maillot Runnosphère !

 

Samedi 22 août – 9h – Départ de l’ut4M !

Après un bon petit déj avec Manu chez L’amiricoré, un bus m’amène à Uriage pour le départ. J’en profite pour finir mon gâteau sport maison (à base de crème sport déj) Le départ à 9h permet de gagner une bonne nuit de sommeil. Je suis bien détendu, en forme ! Le soleil est déjà là, l’ambiance est assez détendu dans le parc. Les bénévoles offrent le café. ça va chauffer ;)

Le départ est surprenant. En footing tranquille je double pas mal de monde. Le traileur serait-il devenu raisonnable sur ses départs de course ? On fait une petite boucle pour étirer le peloton,

En fait non. Dans petite bosse pour monter au chateau d’Uriage, tout le monde garde la même vitesse. On est vraiment parti pour 90 bornes à ce rythme là ? De mon coté je ralenti comme prévu en me limitant au cardio, déjà sur la limite haute que je m’étais fixé (un petit 80% de fcm avec le droit de jouer vers 85 pour absorber le départ ;))

 

#ut4m c’est bien parti ! J’ai semé tout le monde :)

Une photo publiée par Mangeur de Cailloux (@mangeurdecailloux) le

Chamrousse

On monte donc en direction de Chamrousse, 1800m de D+ sur 21km. Un premier étage sur le sentier d’Aplomb offre déjà une magnifique vue. Je ne suis pas bien sur de mon coup, mais il me semble que la vallée que je vois en dessous, je vais devoir la traverser pour monter sur la montagne d’en face. ça à l’air loin. Je n’y pense pas trop…

ut4m-arselle

Le 2ème étage, c’est l’Arselle. Je fais le plein d’eau en moins d’une minute et poursuit ma montée. Elle passe assez vite. J’en prends plein les yeux et ramène quelques images :

ut4m-lac.achardLa Croix de Chamrousse est maintenant là après 4 heures d’effort. Le public est bien présent dans le petit aller-retour et c’est vraiment sympa. Je ma fait pointer à la tente du ravito et file m’assoir pour grignoter, faire le plein. Je récupère bien car je sais qu’un bon morceau de Belledonne m’attends. Neuf minutes plus tard me voilà reparti.

Belledone

La traversée de Belledone et de ses lacs est la plus belle partie de la course. Ce n’est pas franchement roulant, et il faut souvent choisir entre regarder le paysage et regarder où on met ses pieds pour ne pas tomber ! Les gros cailloux s’enchainent. Je profite de passer à proximité d’un ruisseau pour tremper ma casquette, me rincer un peu les bras et jambes pour éliminer la croute de sel !

« Casquette rouge » m’accompagne depuis un moment. On a un accord : il me traine dans les montées, et moi dans les descentes et les quelques bouts de plats. Et ça fonctionne plutôt bien ! En plus il est du coin et me fait le topo sur les environs, ce qui nous attend. C’est bien agréable.

Le refuge de la Pra est bien posé au dessus de son bel alpage et donne vraiment envie d’y revenir en étant moins pressé… Les magnifiques paysage se suivent et ne se ressemblent pas.

ut4m-refuge.de.la.pra

La deuxième bosse est maintenant devant moi. Tandis qu’un planeur semble compter les coureurs depuis le ciel, j’attaque la montée. Je mange encore pas mal de cailloux. Le col sous le Grand Colon semble bien loin et je discerne difficilement les autres concurrents tout en haut !

J’y serais au bout de 6 heures de courses. Je prends 3′ pour ranger mes bâtons et prendre une nouvelle claque :) Le bout de la vallée grenobloise est en bas. La Chartreuse en face. 2000m à descendre, 1500 à remonter !

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Gaz !

C’est parti pour 17km de descente ! Je vais me faire plaisir. Peut-être un peu trop mais ça roule tellement bien. Un peu de technique au début, des chemins plus roulant ensuite, mais quasiment que pour moi. Le kilo en 4’25 affiché dans le récap de mon Ambit doit être là :) Je reprends quelques coureurs, mais ce n’est pas la foule. Je profite encore !

La vue depuis le Grand Colon. Il faut aller en face !

La vue depuis le Grand Colon. Il faut aller en face !

La descente est interrompue une première fois par le ravitaillement de Freydières où je suis toujours le même « protocole » : m’assoir immédiatement et faire le plein, puis sortir me rincer la tête, les bras et jambes. Il doit faire 30°… La descente continue. Un petit ravito officieux au Versoud offre un nouveau rafraichissement bienvenue avant la traversée de la vallée : un peu plus de 5km de plat, entre les champs de maïs. J’avais la forme, j’ai voulu et pu bien courir malgré une pause imposée :

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bloqué !

J’en profite pour discuter avec André qui garde joyeusement le passage à niveau et me relance vers Saint Nazaire les Eymes

Chartreuse

Le ravito a été assez rapide malgré le « protocole » complet (12′). Je fais bien le plein d’eau, en ajoutant du sel à la flasque qui ne contient pas de boisson iso car je crains les effets de la chaleur et le nouveau KV qui m’attend…

1100m en 4km qui ne vont pas très bien se passer. Ou plutôt bien lentement. Je me traine désespérément, avec un cardio qui monte moins, les jambes qui ne poussent plus et la chaleur qui plombe. Je passe mon temps à regarder mon altitude, à boire. Je me force à manger toujours régulièrement, en espérant trouver un supplément d’énergie dans mes barres. Mais ça coince.

Du coup je me pose. De toutes façons ça doit faire 20′ que ne n’ai pas vu quelqu’un… Et c’est pas si mal. Je vide ma 3ème flasque que j’avais en réserve derrière dans celle de devant, passe les barres dans les poches les plus accessibles, et prend une photo de ma tête pour ne pas oublier les moments difficiles :)

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Quand la pause s’impose

Le col de la Faita arrive enfin, face à Chamechaude. Il est presque 21 heures et la nuit tombe doucement. Le ravitaillement du Habert de Chamechaude se fait entendre mais je le sais encore loin. Un magnifique spectacle s’offre à moi dans cette montée : en me retournant je peux apercevoir les frontales des coureurs qui me suivent sur le plateau de l’Eimendras du dessus.

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Chamechaude au couché de soleil

Deux bénévoles font des aller-retours dans la descente et annonce de la pastèque au ravito. Elle en deviendra une obsession. Je n’ai toujours pas pris la peine de sortir ma frontale pour profiter un peu plus de la nuit, mais je retrouve un peu de jus avec cette idée de pastèque en tête. Elle tiendra largement ses promesses..

Chamechaude

Je prends 20′ de pause, toujours aux petits soins. Des parts de pastèques donc, 2 bols de soupe. ça fait du bien. Le brieffing aussi rassure : il n’y a que 400m à monter. Une paille par rapport aux précédentes ascensions. J’embarque avec moi Henri. Il se dit néophyte du trail, plutôt sportif et randonneur, mais il est au même point que moi. Peut-être plus frais. Nous ferons pas mal de chemin ensemble. Je vais même emmener un petit grupetto dans l’ascencion.

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Il faut regarder où on mets ses pieds (je me mettrais d’ailleurs au tas. Sauf que moi je tombe en descente…) mais aussi vers le haut. Les scintillements des frontales sur la montagne se mélangent avec les étoiles. J’arrive à maintenir un niveau suffisant d’effort pour rester en tee-shirt. Je ne traine quand même pas trop à 2000m. Le temps de saluer le sympathique gendarme responsable de la sécurité et du pointage, de prendre une photo, je me lance dans les 1000m de descente jusqu’au ravitaillement.

Le Sappey

Mon affaire commence sérieusement à sentir la fin. Je suis pointé 51ème à la sortie d’une pause un peu longue où j’ai trop papoté avec mon prédécesseur. Mais je le sais aussi presque sec et me dit qu’un top 50 ferait un joli compte rond. Cette perpective me motive bien. Et les relais sont maintenant plus courts : un peu plus de 6km pour cet avant-dernier, mais avec une montée de 300m pour rejoindre le Fort Saint Eynard. Je sais que j’irais au bout !

Je reprends donc rapidement le 50ème, Yohan,  sauf que le 52ème, Yannick,  nous dépose littéralement dans la montée ! Je tente de m’accrocher… l’écart reste stable.

On prend tous les 3 quelques photos avant la descente. Il avance bien et j’ai un peu mal aux pieds pour vraiment envoyer (bon aux cuisses aussi avec des petites décharges dans les quadris mais ça doit faire 2 heures que c’est comme ça et ça avance toujours alors je n’y prête plus attention :) )

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Col de Vence

Dernier CP. Il reste 10 bornes. C’est rien ! Je me rappelle parfaitement de cette portion et de son faux plat montant. 7’35 de pause, Yannick me file entre les pattes alors que Johan n’est pas encore arrivé… Un peu obnubilé par mon Top50, j’envoie du gros, pousse fort sur les bâtons en me disant que c’est le moment ou jamais pour vider tout ce qu’il me reste de bras. Derrière le parcours ne fait que descendre. Dans mon élan, je franchis cette dernier bosse à…. 3,5 km/h ! :) Mais reprend finalement le pauvre Yannick lâché par son dos.

Bastille

Je commence à savourer doucement même si je ne réalise pas trop. Le sol est souvent jonché des cailloux bien fixés qui malmènent mes pieds et je suis un peu déçu de ne pas mieux pouvoir me détendre. Encore une fois je suis seul pour la descente, reprenant parfois des concurrents du 160 avec qui j’échange toujours de sympathique encouragement. Je les félicite aussi car je ne me vois pas vraiment doubler la mise…

La panneau « arrivée à 5km » me fille une énorme banane. Je range finalement mes bâtons sur mon sac pour être un peu plus libre.

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En bas de la forteresse, l’organisation a tracé au sol une ligne verte qui m’hypnotise. Je file tel un missille supersonique à 11km/h… Et paf !

D’un coup, l’arrivée est là. C’est fini. Le speaker recueille mes impressions pour la foule en délire personne car il est 3 heures du matin. Un hindu en costume traditionnel m’offre un thé. C’est surréaliste. Je lui demande très sérieusement s’il n’est pas trop sucré… il est super bon :)

Fin de l’UT4M Grenoble

Merci à tous pour vos encouragements ! Par les réseaux sociaux, sms, appels. Merci à ma famille pour son soutient sans faille, à Greg pour les coups de culs et conseils bien placés, à Michaël pour l’accueil 3 étoiles même à 4 heures du matin, pour la Sporténine pas périmée. Je me suis fait le tube !

C’est une bien belle course. Pas facile à appréhender de part sa longueur, les pentes et la variété des terrains. Mais les paysages sont magnifiques, de jour comme de nuit !